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UEMSS 2023 : des modules « Savoirs & Démocraties » riches en réflexions

Lors de l’UEMSS – Université des mouvements sociaux et des solidarités, le MSER s’est associé à une quinzaine d’organisations partenaires* pour proposer deux journées complètes d’ateliers, les 24 et 25 août derniers. Ces deux modules « Savoirs & Démocraties » ont rassemblé chaque jour une trentaine de participant⋅es, dont certain⋅es ont suivi l’ensemble des deux journées.

À l’image de la dynamique du MSER, la préparation des ateliers a été collégiale, tout comme leur animation le jour J qui a ainsi bénéficié d’une diversité de formats (témoignages, arpentage de textes, jeux de rôle, débats…). Ils ont permis de renforcer les liens entre nos organisations, par exemple avec les intervenant⋅es venu⋅es enrichir les échanges de leurs expériences. Quant aux participant⋅es, ielles ont aussi pu contribuer à travers une frise réalisée en direct dans la salle et un document de prise de notes partagé.

Des préoccupations partagées

Les participant⋅es se sont reconnu⋅es dans notre critique de la prétendue « neutralité » des sciences et techniques, et rejoignent l’idée que leur élaboration se situe dans un cadre marqué politiquement dont il faut avoir conscience.

« L’outil n’est qu’un moyen… mais il n’est pas neutre ! »

A travers des témoignages forts, les ateliers ont permis de mesurer l’impact de cette pseudo-neutralité sur celles et ceux qui prennent part au développement des sciences et techniques : les dissonances sont souvent difficiles à gérer… 

Ceci invite à mettre davantage en lien les « producteur⋅rices de savoirs » (notamment académiques) et les mouvements sociaux, pour qu’ielles retrouvent un sens à leur activité. Les derniers échanges ont permis d’envisager les moyens pour développer ce lien plus étroit et direct entre sciences et société : comment communiquer, visibiliser, outiller, faire ensemble ?

Que retenir des échanges ?

L’impression partagée que les « progrès » échappent aux individus : ils s’imposent à eux, ne sont pas envisagés comme des réponses à des besoins mais comme des transformations de nos usages. En créant de l’insatisfaction, ou bien de nouveaux marqueur sociaux à respecter, le « progrès » crée en réalité de nouveaux débouchés industriels et commerciaux.

L’impression d’une fuite en avant de plus en plus rapide : lorsqu’une étape est franchie, qu’une pratique est changée, on ne revient pas en arrière. Par effet de cliquet, les nouveaux usages dictés par la technique effacent les précédents : on s’en assure en installant une dépendance, et en faisant disparaître la technique ou l’infrastructure précédente (le tout-numérique remplace le papier dans les démarches administratives ; les cabines téléphoniques disparaissent de l’espace public à mesure que l’utilisation du smartphone s’étend…).

Plateau vidéo réalisé lors de l’UEMSS par la web-télévision associative et indépendante TV Bruits.

Pour celles et ceux qui se sont engagé⋅es dans la production de savoirs et techniques en pensant contribuer à changer le monde, c’est une sensation de mensonge qui domine, à mesure de la prise de conscience d’avoir été form(at)é⋅es pour reproduire et accélérer les dérives du modèle de développement dominant. Un développement qui s’affiche sans alternative…

Et maintenant, on fait quoi ?

Face à ces dissonances, et pour supporter le mal-être qu’elles induisent, les stratégies d’actions oscillent entre deux tendances. 

De l’intérieur, faire évoluer les institutions (laboratoires, entreprises, établissements de formations…) et amorcer leur bifurcation en faisant autrement : recherches participatives/collaboratives/citoyennes, évolution des formations… Voire les désarmer en profitant d’y être intégré⋅es, par exemple en lançant l’alerte sur des pratiques qui perpétuent la prédation des populations, des ressources, des milieux. 

Ou bien s’en extraire en désertant, et en s’engageant pour des alternatives qui tentent d’inventer d’autres modèles à mettre en pratique.

Une préoccupation constante traverse toutes ces stratégies et ces postures vis-à-vis du modèle dominant : l’enjeu de mieux relier l’élaboration des savoirs (scientifiques ou techniques) et les mouvements sociaux/habitants/citoyens.

Pour ce faire, plusieurs pistes restent à développer et à faire converger : 

> inventer de nouveaux cadres démocratiques pour décider des orientations de recherche et de leur financement (assemblées citoyennes, à l’image de ce que propose HorizonTerre) ; 

> se doter de nouveaux outils pour se connaître et se relier (proposition de cartographie par le MSER, ou par les Naturalistes Des Terres…), 

> reconsidérer la neutralité des chercheur⋅ses et leur devoir de réserve, pour leur permettre de combiner en même temps leurs casquettes de chercheur⋅ses et de citoyen⋅nes engagé⋅es.

* Aitec, Collectif des Associations Citoyennes (CAC), Collectif Vous n’êtes pas seuls, Écopolien, Global Chance, Ingénieurs Sans Frontières, IPAM Initiatives pour un autre monde, Klask, Mouvement pour des Savoirs Engagés et Reliés, Next Planning, Observatoire des formations citoyennes, Réseau Semences Paysannes, Sciences Citoyennes, Sciences Critiques